La loi n°1.526 adoptée le 1er juillet 2022 avait réformé en profondeur le droit de suite à Monaco afin notamment de l'aligner avec la règlementation européenne et de rendre plus attractif le marché de l'art en Principauté.

L'Ordonnance souveraine n°10.300 du 22 décembre 2023 complète le dispositif.

Bref rappel sur le droit de suite à Monaco

Le droit de suite permet aux auteurs de percevoir, après la première cession, une participation au produit de toute vente d'Suvres originales, graphiques, plastiques et manuscrites impliquant un professionnel du marché de l'art en tant que vendeur, acheteur ou simple intermédiaire.

Il s'applique aux auteurs monégasques et étrangers, sous condition de résidence en Principauté depuis au moins 5 ans ou d'être ressortissant d'un pays qui reconnait réciproquement ce droit aux auteurs monégasques.

Son montant est calculé selon un taux dégressif pour un montant maximal de 12.000 € et survit à l'auteur pour une durée post mortem étendue à 70 ans.

Les apports de l'Ordonnance souveraine n°10.300

Le champ d'application du droit de suite

Tout d'abord, l'Ordonnance souveraine n°10.300 du 22 décembre 2023 apporte des précisions sur le champ d'application du droit de suite.

Il ne concerne plus que les ventes assujetties à la TVA supérieures à 750 euros. La revente de l'Suvre moins de trois ans après la cession initiale par l'auteur est par ailleurs exonérée de droit de suite si le prix de vente est inférieur à 10.000 euros.

Quant aux Suvres originales éditées en quantités limitées d'exemplaires, elles font l'objet de conditions d'assujettissement particulières :

  • Elles doivent contenir une numérotation, une signature ou une autorisation explicite de l'auteur ;
  • Leur nombre ne doit pas dépasser les seuils suivants :
    • Les gravures, estampes et lithographies originales : une ou plusieurs planches ;
    • Les éditions de sculpture : douze exemplaires numérotés et épreuves d'artiste confondus ;
    • Les tapisseries et Suvres d'art textile faites à la main, sur la base de modèles originaux fournis par l'artiste : huit exemplaires ;
    • Les émaux entièrement exécutés à la main et comportant la signature de l'artiste : huit exemplaires numérotés et quatre épreuves d'artiste ;
    • Les Suvres photographiques signées, quels qu'en soient le format et le support : trente exemplaires ;
    • Les créations plastiques sur support audiovisuel ou numérique : douze exemplaires.


En outre, la condition d'implication d'un professionnel du marché de l'art, responsable du bon paiement du droit de suite à l'auteur, a été renforcée.

Pour que le droit de suite s'applique, il faut désormais qu'il intervienne dans le cadre de son activité professionnelle.

La collecte par un organisme de gestion collective

Enfin, l'Ordonnance énonce les conditions dans lesquelles un organisme de gestion collective peut être autorisé par le Ministre d'Etat à collecter le droit de suite à Monaco.

Un organisme de gestion collective est une personne morale poursuivant un but non lucratif et constituée en vue de gérer les droits d'auteur pour le compte de plusieurs titulaires de droits.

Il collecte et reverse aux titulaires de droits les revenus tirés de l'exploitation de ces droits, ainsi que le droit de suite sur le produit de la cession des Suvres.

A titre d'illustrations, dans le pays voisin, la Société des auteurs dans les arts graphiques et plastiques (ADAGP) ou encore la Société des auteurs des arts visuels et de l'image fixe (SAIF) sont des organismes de gestion collective habilités.

L'autorisation du Ministre d'Etat sera accordée si l'entité justifie notamment des compétences professionnelles de ses représentants, de sa capacité à informer les bénéficiaires du droit de suite, et de garanties de moralité.

L'organisme de gestion collective peut également avoir son siège social en dehors de Monaco. Dans cette hypothèse, elle doit toutefois être représentée par une personne morale ou physique domiciliée en Principauté. Ce représentant demeure également tenu de fournir des informations sur ses qualifications professionnelles, son organisation et des garanties de moralité.

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L'Ordonnance souveraine du 5 janvier 2024 contribue à renforcer les droits des auteurs et s'inscrit dans l'effort de modernisation que le projet de loi n° 1045 portant reconnaissance et régime de la propriété des Suvres de l'esprit entend par ailleurs consacrer.

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